ingénuité qui les rendaient autrefois si estimables),
j’eus donc bien de la peine à me
décider. Cependant, à la fin, mon choix fait,
je fis venir chez moi le sujet, et sous divers
prétextes, je trouvai le moyen de l’y tenir
exactement renfermé pendant près d’une
année. Après un laps de temps aussi long,
pendant lequel j’avais tout lieu d’être persuadé
qu’elle n’avait même pas aperçu d’autre
homme que moi, je me déterminai à
commencer sur elle mon expérience. Dans
cette vue, je lui persuadai qu’elle était
malade ; ce qui me fut d’autant moins difficile
que l’état d’inaction et de clôture lui
avait donné une sorte de mélancolie.
« Alors, mêlant quelques animalcules dans une préparation chimique, je la fis prendre à cette fille comme une médecine. J’avais déjà eu, comme bien vous pensez, la précaution de renvoyer mon valet, et je ne permis, dans mon voisinage, à aucun être mâle de forme humaine d’aborder seulement mon logis. Je poussai même le scrupule jusqu’au point de soustraire de chez moi tout tableau ou gravure qui pût en faire naître la moindre idée.
« En six mois, ma potion avait fait un effet très visible sur le sujet que j’avais employé.