même les plus épouvantables catastrophes qui lui arrivent, vous fasse accepter gaiement les petits ennuis, les petites contrariétés. Il faut se conduire avec tout le monde comme l’on se conduit avec ses enfants, il faut user de la même patience et de la même indulgence.
Fuyez les querelles, les disputes. Le jour où quelqu’un commence à vous déplaire, abandonnez-le, doucement, sans rien casser, sans laisser voir votre pensée. Je ne trouve personne de plus idiote que celle qui dit : « Moi, j’ai l’habitude de dire aux gens ce que je pense d’eux. » Ce n’est point de la franchise, c’est simplement de la grossièreté ! Et une grossièreté, bien entendu, dont on est la première victime. Dire aux gens ce que l’on pense d’eux, c’est vouloir faire le vide autour de soi ou s’entourer d’ennemis, n’arriver à rien qu’à s’aigrir chaque jour davantage, s’enlizer dans la misère, vivre dans un perpétuel état de colère, voire de jalousie, devenir bilieux, c’est-à-dire laid.
Vous avez mis une robe claire et des souliers blancs, vous allez sortir… Patatras ! la pluie, une pluie torrentielle ! et vous vous mettez en colère, vous attrapez votre femme de chambre ! À quoi cela sert-il ? Ça ne fait pas cesser la pluie. Rappelez-vous le mot d’Anatole France : Il faut souffrir ce qu’on ne peut empêcher. Nous ne vous demandons pas de suivre par mortification un régime de privations, nous vous demandons seulement de ne pas vous révolter contre l’inévitable. Nous ne vous demandons pas, non plus, d’exagérer, et de déclarer, lorsque la pluie vous surprend : « Quel temps délicieux ! J’adore la pluie ! »
Il y a encore une façon d’arriver à obtenir le calme de l’esprit, qui consiste à s’environner d’objets… calmes. Mais oui ! sur vos murs, pas de tableaux représentant des tempêtes ou des batailles ; comme descente de lit, pas de peau de lion, de tigre ou autres animaux féroces ; prenez de la chèvre, ce sera moins riche, mais ce sera plus sain pour votre esprit. Si vous avez, des domestiques, ne les habillez pas de noir : des gens noirs qui circulent sans cesse autour de vous finissent par vous donner des idées noires. Si vous écrivez beaucoup, servez-vous d’encre bleue : elle vous fera, voir tout en bleu, et malgré vous, vous rendra meilleures, bonnes, car l’on n’écrit pas des choses méchantes avec de l’encre bleue.
Surveillez, aussi, vos lectures : ne gémissez pas avec l’Imitation de Jésus-Christ et Schopenhauer sur cette vallée de misère qu’est la vie, plongez-vous dans