Une fois bien établie, la nouvelle poésie spirituelle songea à aborder de nouveaux sujets, en paraphrasant en vers allemands le Pater noster, le Credo, les dix Commandements et les sept Paroles à la croix. De plus, elle s’appropria les hymnes latines en les traduisant. Au total, le xive et le xve siècle marquent l’apogée de cette grande poésie spirituelle, dont les commencements remontent jusqu’au xie siècle.
La Réforme du xvie siècle, proclamant l’usage du chant allemand dans les cérémonies du culte, se trouvait donc en présence d’un nombre considérable de cantiques spirituels hérités du Moyen-Âge. Elle fit son choix et retoucha légèrement les poésies qui lui semblaient correspondre le mieux à son inspiration. C’est à cette tâche que Luther consacre les richesses de son talent. Cet homme, en qui Friedrich Nietzsche lui-même n’a pas hésité à saluer le génie de la langue allemande, possédait le don d’écouter le langage du peuple, « de regarder sur la bouche des gens », comme il disait lui-même et de reproduire ce langage avec naturel et distinction à la fois.
Il se met donc à l’œuvre. Il retouche et modifie çà et là, tout en sachant conserver leur fraîcheur à ces poésies anciennes. Mais, par là même, il se trouve amené à faire œuvre originale à la façon du Moyen-Âge. Il entreprend de continuer l’œuvre qu’il est en train de réviser, en traduisant à son tour des hymnes latines et des morceaux liturgiques et en faisant des paraphrases de psaumes et de passages bibliques. Dans ces traductions libres, il recrée, en quelque sorte, l’original sous une forme nouvelle, en revêtant des idées données de sa belle langue souple et vigoureuse. Avec l’instinct du génie, il se rend compte que pour bâtir solidement l’édifice nouveau, il faut utiliser les fondations anciennes ; il n’extirpera pas complètement la forêt ; il laissera çà et là subsister les troncs anciens et autour d’eux se développera la végétation nouvelle. C’est précisément, faute de plonger par de