Page:Schwob - Cœur double, Ollendorff, 1891.djvu/286

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connu de dabe ; paraît qu’il a été sapé. C’était un maigre, mais il m’a fait solide. On y va ? »

La femme criant toujours, les camarades l’enfermèrent dans un cercle. Elle déchirait les bourgerons, pinçait et mordait. Deux terrassiers lui tinrent les poings.

Les combattants se cabrèrent, l’outil levé. L’homme au loup abattit sa pioche. Le gars sauta de côté. Le pic retombant rencontra le fer de la pioche, qui rendit un son clair. Puis ils tournèrent autour d’un monticule, sautant de-ci, de-là, frappant à côté, écumants. Ils enfonçaient à mi-jambes dans la terre rouge ; l’homme au loup y laissa ses sabots. Le pic et la pioche se croisaient. Quelquefois des étincelles jaillissaient dans la nuit, quand les ferrures battaient le briquet.

Mais le gars avait de la moelle. Quoique l’autre eût de longs bras au bout desquels la pioche tournoyait, terrible, du pic il paraît les coups de tête et envoyait de furieux revers dans les jambes.

L’homme au loup abattit sa pioche en terre et leva les bras.

« J’vas prendre mes galoches, dit-il. On a la chemise trempée. T’es un gars solide. J’te fais pardon et excuse, moi, La Limande. »

En se retournant, il passa dans le cercle des carriers et regarda la femme sous le nez. Alors il cria un coup et sauta de nouveau sur sa pioche en hurlant : « Ah ! le paillasson ! Ah ! tu m’as gamellé !