Page:Schwob - Cœur double, Ollendorff, 1891.djvu/65

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conduits étroits qui circulaient, trouant le massif de béton, autour de la cour carrée, la clameur des grosses règles de fer qui bouchaient les fenêtres en parallèles obliques, serrait les tempes et faisait hâter le pas. Et vers le centre, dans l’escalier sombre, jonché de vitres brisées, on entendait gémir le treuil avec le soupir étouffé de la pompe de manœuvre. Plus haut, par l’étroit escalier de tôle, montaient les ahans de l’équipe, tandis que la tourelle, soulevée sur son pivot, glissait tout autour de la circulaire avec un grincement de chaîne. Par les fentes de l’énorme cylindre, on voyait se profiler côte à côte, éclairées par une lanterne graisseuse, les pièces jumelles sur leurs affûts blancs ; tout à coup le commandement feu retentissait dans la gaine ; et, collées au cylindre, contre leurs abris, des taches humaines tournaient avec lui ; le silence régnait, interrompu par des heurts de ferraille sur la coupole ; puis l’avertissement appuyez sortait de l’ombre, — et la tourelle sonnait sous une double explosion.

On éprouvait le passage des hommes par un souffle et un frôlement ; parfois un peloton descendait d’un pas rythmé le long des corridors, vers les puits à projectiles ; d’autres enlevaient les madriers, les lambourdes et les demi-gîtes de rechange, pour les porter aux plates-formes, équipaient les cabestans de carrier, cherchaient les armements des chèvres, détachaient les prélarts goudronnés étendus sur les