Page:Schwob - La Lampe de Psyché, 1906.djvu/186

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l’oie rôtie avec des marrons chez Mademoiselle. Oh ! Tu n’as pensé à rien, toi. J’avais emporté des croûtes. Elles sont en bouillie. Tiens !

Elle tendit la main. Ses doigts étaient collés dans une panade froide.

— Je vais chercher des crabes, dit le mousse. Il y en a au bout des Pierres-Noires. Je prendrai la barque de la douane, en bas.

— J’aurai peur, tout seule.

— Tu ne veux pas manger ?

Elle ne répondit rien.

Le mousse secoua les brindilles collées à sa vareuse et se glissa dehors. La pluie grise l’enveloppa. Elle entendit ses pas sucés dans la boue.


Puis il y eut des rafales, et le grand silence rythmé de l’averse. L’ombre vint, plus forte et plus triste. L’heure du dîner chez Mademoiselle était passée. L’heure du coucher était passée. Là- bas, sous les lampes d’huile suspendues, tout le monde dormait dans les lits blancs bordés. Quelques mouettes crièrent la tempête. Le vent tourbillonna et les lames canonnèrent dans les