Page:Schwob - Vies imaginaires, 1896.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mare de sang sur le chemin. La lune parut à une clairière : Alain coupa le mordant de la ceinture, et dénoua les aiguillettes de la bourse, où il y avait seize lyons d’or et trente-six patars. Il garda les lyons, et jeta la bourse avec les virelants à Karandas, pour sa peine, tenant la javeline haute. Là, ils se départirent l’un de l’autre, au milieu de la clairière, Karandas jurant le sang Dieu.

Alain le Gentil n’osa toucher Senlis et revint par détours jusque vers la ville de Rouen. Comme il s’éveillait, après sa nuit, sous une haie fleurie, il se vit entouré par des gens cavaliers qui lui attachèrent les mains et le conduisirent aux prisons. Près du guichet, il se glissa derrière la croupe d’un cheval, et courut à l’église de Saint-Patrice, où il se logea contre le maître-autel. Les sergents ne purent passer le porche. Alain, étant en franchise, hanta librement la nef et les chœurs, vit de beaux calices de métal riche