Page:Schwob - Vies imaginaires, 1896.djvu/69

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sachant que l’amour est la pire des douleurs terrestres, il hait et guérit l’amour. Cependant il est impuissant à chasser Erôs d’un cœur occupé. Alors il saisit l’autre cœur. Ainsi Anterôs lutte contre Erôs. Voilà pourquoi Sextilius ne put aimer Septima. Sitôt qu’Erôs eut porté sa torche dans le sein de l’initiée, Anterôs, irrité, s’empara de celui qu’elle voulait aimer.

Septima connut la puissance d’Anterôs aux yeux baissés de Sextilius. Et quand le tremblement pourpré saisit l’air du soir, elle sortit sur la route qui va d’Hadrumète jusqu’à la mer. C’est une route paisible où les amoureux boivent du vin de dattes, appuyés contre les murailles polies des tombeaux. La brise orientale souffle son parfum sur la nécropole. La jeune lune, encore voilée, vient y errer, incertaine. Beaucoup de morts embaumés trônent autour d’Hadrumète dans leurs sépultures. Et là dormait Phoinissa,