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Miss Vère rendue à son père

qui, malgré ces défauts qui tiennent à votre constitution, possédez néanmoins un bon sens naturel et des connaissances acquises, vous vous laissiez infatuer au point de vous mêler à des entreprises aussi désespérées ? Comment se trouve votre tête lorsque vous êtes engagé dans ces conférences dangereuses ?

— Pas aussi assurée sur mes épaules, répondit Mareschal, que si je parlais de chasse. Je ne suis pas d’un naturel aussi indifférent que mon cousin Ellieslaw, qui parle de trahison comme un bambin de ses contes de nourrice, et qui perd et retrouve sa douce et charmante fille avec beaucoup moins d’émotion, dans l’un et dans l’autre cas, que je n’en éprouverais si j’avais perdu et retrouvé un de mes jeunes lévriers. Mon caractère n’est pas assez roide, et ma haine pour le gouvernement n’est pas assez invétérée pour m’aveugler sur le danger de l’entreprise.

— Alors, pourquoi vous y exposer ? dit Ratcliffe.

— Que voulez-vous que je vous dise ? J’aime de tout mon cœur ce roi exilé, dit Mareschal ; mon père était un des vieux guerriers de Killiecrankie, et il me tarde de voir quelque vengeance exercée contre ces courtisans de l’Union, qui ont acheté et vendu la vieille Écosse dont la couronne a été si longtemps indépendante.

— Et c’est pour courir après de telles chimères, dit Ratcliffe, que vous allez plonger votre pays dans la guerre, et vous-même dans l’embarras ?

— Moi ! dit Mareschal ; pas du tout ; mais embarras pour embarras, j’aime autant que ce soit demain que dans un mois que le moment arrive, puisqu’il doit arriver ; comme disent nos gens de campagne, il vaut mieux plus tôt que plus tard ; je ne serai jamais plus jeune ; et quant à être pendu, comme dit sir John Falstaff, je figurerai à la potence tout aussi bien qu’un autre. Vous connaissez la dernière strophe de la vieille ballade :