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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

couvrir du manteau d’un de vos cavaliers, et ne parlez de moi que comme d’un prisonnier dont vous êtes chargé.

— De tout mon cœur. J’ai promis de vous traiter civilement. — André, donnez votre manteau au prisonnier. Et vous, soldats, songez qu’il y a défense de dire qui il est, et où nous l’avons arrêté.

Ils arrivaient devant une porte cintrée, flanquée de deux tourelles dont l’une, encore entière, était habitée par la famille d’un paysan, et dont l’autre tombait en ruines. La porte avait été brisée par les soldats de Monck, pendant les guerres civiles. Bothwell et sa troupe entrèrent sans obstacle dans une avenue étroite, pavée de grosses pierres, qui conduisait au château, dont on apercevait à travers les arbres, les boulevards extérieurs. C’était une forteresse gothique, et ce qui en restait encore avait un tel aspect de solidité, que le brigadier s’écria : — Il est fort heureux que ce château soit en de loyales mains ; s’il appartenait à l’ennemi, une douzaine de vieilles femmes pourraient le défendre avec leurs quenouilles contre un escadron de cavalerie. Que dit l’inscription ? « Réparé par sir Ralph Bellenden en 1350. » C’est une antiquité respectable. Il faut que je me présente devant la vieille dame avec les égards qui lui sont dus.

Cependant un valet de lady Bellenden était allé en toute hâte annoncer qu’un parti de dragons s’avançait avec un prisonnier. — Je suis certain, dit-il que le sixième est un prisonnier, car on conduit son cheval, et les deux dragons qui le précèdent ont leurs carabines appuyées sur la cuisse. Or, c’est ainsi que nous emmenions toujours les prisonniers du temps du grand marquis.

— Des soldats du roi ! s’écria lady Bellenden ; ils ont sans doute besoin de quelques rafraîchissements. — Dites-leur qu’ils sont les bienvenus, et offrez-leur tout ce qu’ils peuvent désirer. — Je veux les recevoir moi-même. On ne peut avoir trop d’attentions, dans un temps où ils se donnent tant de peine pour faire respecter l’autorité royale. — Dites à ma nièce de venir me trouver sur-le-champ ; et que Jenny Dennison et deux autres femmes se disposent à me suivre.

Tous ces ordres furent exécutés à l’instant, et lady Marguerite descendit d’un air de dignité, jusque dans la cour de son château, pour recevoir ses hôtes. Bothwell salua la noble et respectable dame, et ses manières n’offrirent plus la rudesse qu’on pouvait attendre d’un sous-officier de dragons ; son langage même sembla s’épurer. La vérité est qu’au milieu des vicissitudes d’une vie aventureuse, Bothwell avait quelquefois fréquenté des sociétés qui convenaient mieux à la noblesse de son origine qu’au rang qu’il occupait dans le monde. Pour répondre aux offres obligeantes de lady