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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

qu’au moment de m’en rendre maître, un jeune homme imberbe vienne me ravir ma moisson, et m’enlever ceux que déjà je regardais comme ma proie !

— Burley, dit Macbriar, ne t’échauffe pas ainsi contre un enfant qui n’est pas digne de ta colère : qui sait si ce jeune homme n’a pas été inspiré par Dieu pour mettre plus vite en notre pouvoir le château de Tillietudlem ?

— Paix ! ne fais pas toi-même tort à ton propre jugement. N’est-ce pas toi qui m’as averti le premier de me méfier de Morton ; ce jeune homme ingrat est le fils de mon ancien ami. Il faut te ressembler, Éphraïm, quand on veut se dégager des liens de l’humanité.

Ce compliment toucha le cœur du prédicateur.

Burley espérait l’amener d’autant plus facilement à ses vues, que déjà ils étaient d’accord dans le conseil sur le gouvernement de l’église. — Rendons-nous au château ; il y a dans les papiers que nous y trouverons quelque chose qui vaut pour nous un chef valeureux et cent cavaliers.

— Mais ce chef, ces cavaliers, seront-ils des enfants du Covenant ? répondit Macbriar. Nous avons déjà parmi nous trop de ces hommes plus avides de terres, d’argent et d’or, que de la parole divine. Ce n’est pas par de tels défenseurs que la délivrance s’opérera.

— Tu te trompes ; ces hommes mondains ne sont pour nous que des instruments. Quoiqu’il arrive, du moins la femme moabite sera dépouillée de son héritage, et ni l’impie Evandale, ni Morton l’érastien ne posséderont ce château et les domaines qui en dépendent.

À ces mots Burley marcha le premier, et il entra dans Tillietudlem où il s’empara de l’argenterie et de tout ce qui pouvait servir aux besoins de l’armée : il fouilla le chartrier et les autres endroits où l’on conservait les papiers de famille, traitant avec mépris les remontrances de ceux qui lui rappelaient que la capitulation garantissait le respect des propriétés particulières.

Dans le cours de la journée Kettledrummle et le laird de Langcale arrivèrent aussi au château. Ils envoyèrent alors un exprès au presbytère de Milnwood, pour inviter le révérend Poundtext à venir assister au conseil ; mais Poundtext se souvint qu’il existait là un cachot muni d’une porte de fer, et il résolut de ne pas confier sa personne à ses confrères irrités. Il reçut parfaitement bien le messager, et partit pendant la nuit pour Hamilton, porteur de la nouvelle que les autres chefs comptaient s’y rendre dès qu’ils auraient réuni un corps suffisant de puritains pour imposer à la partie de l’armée dont ils se défiaient.