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CHAPITRE XXXII

Ils demandent au ciel qu’il leur donne en partage,
Du lion la fureur sauvage,
Du tigre la férocité.

Fletcher.

La nuit approchait, et depuis deux heures Henry et son fidèle serviteur n’avaient vu aucun de leurs malheureux compagnons, lorsqu’ils aperçurent une grande ferme solitaire, située à l’entrée d’une ravine sauvage.

— Nos chevaux, dit Morton, ne peuvent nous porter plus loin : voyons si l’on voudra nous recevoir ici.

Il s’avança vers la maison, tout annonçait qu’elle était habitée. Les fenêtres étaient fermées avec soin ; la porte aussi. Morton entendit plusieurs voix : il frappa, personne ne vint ouvrir et l’on garda le silence. En faisant le tour du bâtiment, pour s’assurer s’il y avait une autre entrée, Morton et son valet trouvèrent une écurie dans laquelle étaient déjà une douzaine de chevaux encore sellés, dont l’air fatigué et les blessures que plusieurs avaient reçues leur persuadèrent qu’ils appartenaient à quelques-uns de leurs compagnons d’infortune.

— Cette rencontre est de bon augure, dit Cuddy : il doit y avoir ici de quoi manger, car voici un quartier de bœuf encore fumant.

Encouragés par ces apparences, et après avoir attaché leurs chevaux, ils retournèrent vers la maison, frappèrent de nouveau, et dirent qu’ils faisaient partie de l’armée presbytérienne.

— Qui que vous soyez, répondit enfin une voix lugubre, ne troublez pas ceux qui, pleurant la désolation et la captivité du peuple, cherchent les causes de la colère divine.

— Ce sont des whigs enragés de l’ouest, dit Cuddy ; je reconnais leur jargon.

Las d’attendre une réponse, Morton avait forcé la fenêtre, et venait de sauter dans la large cuisine d’où la voix s’était fait entendre. Cuddy le suivit par le même chemin.

Le maître et le serviteur se trouvèrent alors dans la compagnie d’une douzaine d’hommes armés, en apparence occupés à prier, et assis autour d’un grand feu devant lequel cuisait leur souper.