qui l’entend prononcer ! qu’il soit réduit à invoquer la mort, et que la mort soit sourde à ses vœux !
Qu’il est doux, qu’il est doux d’habiter sous l’ombrage des bois, quoique les oiseaux gardent le silence ! Alix prépare le foyer du soir ; son amant apporte le bois de la forêt.
Urgan paraît : ce nain hideux se place devant lord Richard. Le chevalier fait le signe de la croix, et se recommande à la protection du ciel.
— Je ne crains point ce signe redoutable, lui dit le fantôme menaçant ; je ne le crains point quand il est fait par une main sanglante !
Mais Alix, remplie de courage, lui répond sans hésiter : — Si le sang souilla sa main, c’est le sang des bêtes fauves !
— Non, non, femme intrépide, dit l’esprit : le sang qui rougit cette main profane, c’est le sang de ta race ! le sang d’Ethert-Brand ! —
Alors Alix s’avance, et fait aussi le signe du salut : — Si le sang rougit la main de Richard, dit-elle, ma main est sans tache !
Je te conjure, fantôme de l’enfer, au nom de celui que redoutent les démons, de nous apprendre d’où tu viens, et quel motif t’amène ici. —
— Il est doux, il est doux d’habiter le royaume de la féerie[1], d’écouter les concerts des oiseaux enchantés, d’assister aux jeux brillans des esprits qui forment la cour de notre monarque et l’escortent à cheval !
Rien n’est resplendissant comme le pays des fées (m) ; mais ce n’est qu’un faux éclat semblable à l’impuissant rayon que le soleil de décembre laisse tomber sur les neiges et les glaces.
Notre forme, capricieuse et inconstante comme cette lumière des jours d’hiver, fait de nous tour à tour un chevalier, une dame et un nain hideux.
- ↑ Les sujets du royaume de féerie étaient recrutés dans les régions terrestres, comme les familles des Bohémiens ; mais les esprits volaient et les enfans et les adultes, Plus d’un chevalier qu’on croyait dans sa tombe était devenu un citoyen du pays des fées.