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Page:Scott - Oeuvres de Walter Scott, trad Defauconpret, 1836.djvu/417

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James raccourcit les rênes de son coursier : il fait un geste à son écuyer, qui aussitôt va saisir son étrier :

— Devaux, lui dit-il, vois-tu ce vieillard de haute stature, et dont l’aspect annonce l’indigence ? remarque comme ses pas sont assurés, avec quelle activité il presse sa marche et gravit la montagne ! Sais-tu d’où il vient, et qui il est ?

— Non, ma foi ; c’est probablement quelque campagnard, qui figurerait très-bien, il me semble, dans la suite d’un noble baron ?

— Non, non, mon cher Devaux ! La crainte et la jalousie ne peuvent-elles te rendre plus clairvoyant ? Avant qu’il eût atteint le bas de la montagne, j’avais déjà reconnu de loin sa démarche et son aspect imposant ; il n’est point en Ecosse de guerrier d’une pareille taille. Par saint Serle ? c’est Jacques de Douglas, l’oncle du comte exilé. Hâtons-nous d’arriver à la cour pour y annoncer l’approche d’un ennemi redouté. Le roi doit se tenir sur ses gardes ; il est bon qu’il ne rencontre pas Douglas sans être prévenu.

Ils dirigèrent leurs coursiers sur la droite, et arrivèrent à la poterne du château.

XX.

Douglas, qui venait de l’antique abbaye de Cambus-Kennets, s’entretenait tristement avec lui-même en suivant le sentier de la montagne.

— Oui : mes pressentimens et mes craintes ne m’ont point trompé ; le noble Graham est dans les fers, et le farouche Roderic sentira bientôt le glaive vengeur du roi d’Ecosse ! Moi seul je puis prévenir leur destin…… Dieu fasse que leur rançon n’arrive pas trop tard !…

L’abbesse m’a promis que ma fille serait l’épouse du Christ !… Que le ciel me pardonne une larme de regret ! qui connaît mieux que son père combien Hélène a de vertu ! Mais oublions un bonheur qui a fui, il ne me reste plus qu’a mourir !… O vous, tours antiques dont les remparts virent un Douglas périr de la main de son roi ; et toi, éminence fatale[1], qui entendis si souvent retentir la hache homicide, lorsque la main sanglante du bourreau immo-

  1. Eminence située au nord-est du château, où l’on exécutait les prisonniers d’Etat. Stirling fut souvent teint du sang le plus noble. Voici l’apostrophe que lui adresse J. Johnston :

    Discordia tristis
    Seu quoties procerum sanguine tinxithumum !
    Hoc uno infelix, et felix cætera, nusquàm
    Tutior aut cælifrons geniusve soli.

    Le sort de William, huitième comte de Douglas, est connu de tous ceux qui ont lu l’histoire