Page:Scribe - Le Verre d'Eau ou les Effets et les Causes, 1860.djvu/14

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pas de grande dame ! Il est quelqu’un, j’en conviens, qui, sans se faire connaître, m’a servi de protecteur… un ami de mon père… vous peut-être ?…

BOL. Non, vraiment…

MASH. Vous êtes le seul cependant que je puisse soupçonner. Orphelin et sans fortune, mais fils d’un brave gentilhomme tué sur le champ de bataille, j’avais eu l’idée de demander une place dans la maison de la reine : la difficulté était d’arriver à sa majesté, de lui présenter ma pétition ; et un jour d’ouverture du parlement, je me lançai intrépidement dans la foule qui entourait sa voiture ; j’y touchais presque lorsqu’un grand monsieur, heurté par moi, se retourne et, croyant avoir affaire à un écolier, me donne sur le nez une chiquenaude.

BOL. Pas possible !

MASH. Oui, monsieur… je vois encore son air insolent et ricaneur… je le vois, je le reconnaitrais entre mille, et si jamais je le rencontre… Mais dans ce moment la foule, en nous séparant, m’avait jeté contre la voiture de la reine à qui je remis ma pétition… elle resta quinze jours sans réponse. Enfin je reçois une lettre d’audience de Sa Majesté !… Vous jugez si je me hâtai de me rendre au palais, paré de mon mieux, et à pied pour de bonnes raisons… J’étais près d’arriver, lorsqu’à deux pas de Saint-James, et vis-à-vis d’un balcon où se tenaient de belles dames de la cour, un