— Moi, je vous dirai : En agissant ainsi, vous me réhabiliterez à mes propres yeux. Ce sentiment dont je rougissais tout à l’heure, j’en serai presque fière, en pensant qu’il était si dignement placé. Partez donc, Fernand, partez avec mon estime, avec mon amitié ! Quant à moi, ne vous en inquiétez pas. Je suis déjà habituée au malheur ; s’il est plus grand que mes forces… si j’y succombe, vous vous direz (et cela vous donnera peut-être consolation et courage), vous vous direz : Je n’étais pas seul à souffrir.
Fernand, hors de lui-même, s’écria :
— J’obéis ! j’obéis ! je serai digne de vous ! mon courage égalera le vôtre, et dussé-je aussi en mourir, je jure devant vous le bonheur de Carmen !
— Taisez-vous, dit Aïxa en écoutant… N’avez-vous pas entendu le froissement d’une étoffe ?
— Non… non, dit Fernand, je n’entends rien, si ce n’est le vent qui agitait cette draperie que tout à l’heure j’ai vue remuer.
Et il montrait une des portières du salon.
— Adieu ! adieu ! dit Aïxa, il est tard ; partez !.. et à demain.
Elle reconduisit Fernand jusqu’à la seconde pièce, rentra dans celle qu’elle venait de quitter, et dit en écoutant encore :
— C’est singulier… J’avais cru entendre marcher tout à l’heure dans la pièce voisine !
Elle y regarda, il n’y avait personne ; elle rentra dans sa chambre en se disant :
— Je m’étais trompée.
Non, elle ne s’était pas trompée.
Pendant que Carmen essayait sa robe de mariée, elle avait entendu un carrosse rouler dans la cour de l’hôtel ; elle connaissait le bruit de cette voiture, et donna ordre à l’une de ses femmes de voir si ce n’était point celle de Fernand d’Albayda.
La femme revint et dit :
— Le seigneur d’Albayda vient d’arriver ; je lui ai annoncé que la senora ne serait point visible ce soir.
Carmen eut d’abord un mouvement d’impatience