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piquillo alliaga.

Je jure sur l’évangile que le duc de Lerma a présenté ce verre à la reine.


LVII.

les conditions.

Le roi, prêt à signer, s’arrêta, jeta vivement la plume et s’écria avec colère :

— La duchesse de Santarem ! nous serons ravis de la voir ! Qu’elle entre ! qu’elle entre ! Pardon, mes pères, et vous, monsieur le duc ; nous reprendrons cette affaire plus tard.

Il y avait dans son geste et dans sa voix une expression tellement impérative qu’il n’y avait pas moyen de rester davantage. Ils sortirent donc. Le duc, en s’éloignant lança un coup d’œil d’indignation à l’huissier malencontreux qui avait annoncé la duchesse et qui venait ainsi, sans le savoir, de renverser leurs projets.

Le pauvre huissier n’aperçut pas le regard foudroyant du ministre, car dans ce moment il s’inclinait jusqu’à terre pour le saluer.

Mais le lendemain il fut destitué sans avoir jamais pu deviner la cause de sa disgrâce.

Le roi n’avait jusque-là connu dans son amour qu’un tourment, c’était de ne pas voir celle qu’il aimait ; qu’une crainte, c’était de n’en pas être aimé. Il ne lui était pas venu à l’idée que ce cœur insensible pour lui pût ressentir de l’affection pour un autre.

Il avait toujours et complétement ignoré le supplice de la jalousie ; celle qu’il ressentait en ce moment venait, comme toute passion nouvelle et non encore éprouvée, l’envahir tout entier.

À la vue d’Aïxa, son sang avait reflué vers son cœur ; il était pâle ; ses lèvres tremblantes balbutiaient des mots inarticulés qu’il achevait à peine, et son trouble était d’autant plus violent qu’il faisait tous ses efforts pour le cacher.

Enfin, il lui fit signe de s’asseoir, en essayant de