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piquillo alliaga.


Non, dit le matelot en le retenant, nous règlerons cela à bord ; marché conclu, touches-là.
s’offrit à leurs regards. Quelques arbres y croissaient encore ; l’herbe y verdoyait dans quelques endroits, car ce sol de rochers, ce terrain aride, était arrosé continuellement par les eaux abondantes d’un torrent dont la source supérieure bouillonnait au-dessus de leur tête.

Fatigués par cette longue et pénible marche, les Maures bénirent cette onde bienfaisante qui leur permettait de se rafraichir et d’accomplir, en signe d’actions de grâces, les ablutions commandées par les rites de leur croyance.

Pendant ce temps, et au moment où les premiers rayons du jour éclairaient la montagne, Augustin de Mexia et ses troupes s’avançaient pour attaquer le camp des Maures. Le général espagnol avait fait faire à une partie de ses soldats une manœuvre admirable pour tourner la montagne de droite, la seule qui lui parût accessible. Il avait calculé les jours et les heures que devait leur coûter cette longue et difficile opération ; il avait envoyé ses ordres en conséquence à don Fernand d’Albayda, et toutes les mesures de l’habile général avaient été si bien prises, qu’il gravissait lui-même le nord de la montagne pendant que don Fernand se mettait en marche par le midi, et que la colonne expéditionnaire franchissait les derniers rochers qui régnaient à l’est.

Les trois corps d’armée, étonnés de n’avoir pas été inquiétés dans leur marche, débouchèrent à la même heure et presque au même instant sur le plateau qui était censé occupé par les Maures, qu’ils devaient ainsi accabler par trois côtés différents. Quant au quatrième côté, nous savons qu’il était fermé par une muraille de granit à pic.

Rien ne peut rendre la stupéfaction de don Augustin de Mexia au profond silence et surtout à la vaste solitude qui régnaient autour de lui.

Aucune apparence, aucun vestige de ce camp qu’ils venaient détruire, de ces Maures qu’ils venaient massacrer. Tout avait disparu ! et comment dix à douze mille soldats, sept ou huit mille femmes et enfants