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Page:Scribe - Théâtre, 1.djvu/331

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DORMEUIL.

Comment, si cela m’est égal ? Lorsque les bans sont publiés, lorsque tout le monde est invité !… Voyons, Cécile, parlons un peu raison. J’ai cinquante mille livres de rente, et n’ai que toi d’enfant ; je ne t’ai jamais rien refusé, je ne t’ai contrariée en rien : mais aussi tu m’avoueras que cette fois… à moins que tu n’aies quelque inclination, quelque amour…

CÉCILE.

Moi, de l’amour ! moi… Mon dieu, dans tout ce que j’ai à vous dire, il n’y a pas un mot d’amour : mais en revanche, il y a de la haine tant que vous en voudrez.

DORMEUIL.

Comment, tu haïrais ce pauvre Frédéric ?

CÉCILE.

Eh ! non, ce n’est pas lui ; je rends justice à ses bonnes qualités, à son mérite : mais il est quelqu’un dans le monde que je ne puis souffrir, que je déteste ; et je crois que c’est cette haine-là qui m’empêche d’avoir de l’amour pour un autre. Vous savez bien que d’abord vous vouliez m’unir à M. Gustave de Mauléon.

DORMEUIL.

Oui, j’avoue que, sous quelques rapports, je l’aurais préféré à Frédéric : avec autant d’amabilité, il avait plus de jugement, plus de raison. Ayant autrefois fait la guerre avec honneur, il occupait alors dans la diplomatie une place importante… Il y a deux ans, il avait l’air de te faire une cour assidue ; mais