Page:Scribe - Théâtre, 2.djvu/34

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SOUFFLÉ.

Oui, quel est là dessus votre système ? Le champ est ouvert aux innovations ; le génie peut se donner carrière.

ALPHONSE.

Ma foi, monsieur… (À part.) Que le diable l’emporte.

SOUFFLÉ, bas à Antoine.

Vous voyez qu’il se trouble ; il croyait qu’il se jouerait de moi ; mais il se trompe. (Haut.) Je vous demanderai, monsieur, si vous faites cuire l’ortolan dans sa barde, ou dans la truffe elle-même ?

ALPHONSE, embarrassé.

Dans sa barde ; mais je crois…

SOUFFLÉ, à Antoine.

Il ne s’en doute pas. (À Alphonse.) Écoutez-moi ; nous prenons, c’est-à-dire, vous prenez une truffe d’une dimension… à peu près… la plus grosse qu’on pourra trouver ; vous l’évidez comme il faut, et y placez l’ortolan enveloppé d’une double barde de jambon cru, légèrement humectée d’un coulis d’anchois. Il y en a qui mettent des sardines, mais c’est une erreur, une erreur des plus grossières qu’on puisse faire en cuisine. Vous garnissez vos truffes d’une farce composée de foies gras et de moelle de bœuf pour entretenir un onctueux et prévenir le dessèchement : feu modéré dessus et dessous ; vous faites usage du four de campagne pour donner la couleur, et vous servez chaud. Voilà, monsieurr comme on traite l’ortolan, à la provençale.