croire qu’il parlaſt ainſi, ſans avoir quelque aſſurance de Creſus, ceux qui advertirent Abradate de la choſe, la luy dirent comme n’en doutant pas : de ſorte que tout deſesperé, il fut chez Doraliſe qui ſe trouvoit mal, & que la Princeſſe eſtoit allée voir. De vous dire Madame, tout ce qu’Abradate dit ce jour là à la Princeſſe, il ne me ſeroit pas poſſible : car il luy dit tant de choſes, qu’à peine pouvoit elle luy reſpondre. Tantoſt il ſe pleignoit de l’indifference qu’elle avoit pour luy : tantoſt il la conjuroit de l’aſſister : un moment apres, il ne luy demandoit pour toute grace, que de luy abandonner Mexaris : ainſi paſſant d’un diſcours à l’autre, ſans changer pourtant de ſujet, toute l’apres-diſnée ſe fuſt paſſée ſans rien reſoudre, ſi Doraliſe n’euſt enfin pris la parole. Mais Madame, dit elle a Panthée, pourquoy n’employez vous pas Perinthe, aupres du Prince voſtre Pere ? vous sçavez qu’il y eſt tout puiſſant ; il eſt vray, dit Panthée, mais c’eſt que je ne puis me reſoudre qu’à l’extremité, à deſcouvrir mon cœur à tant de gens. je promets pourtant, dit elle, ſi la choſe eſt auſſi avancée que le Prince Abradate la croit, de faire cet effort ſur moy meſme : & de parler à Perinthe, afin qu’il parle au Prince mon Pere contre Mexaris. Et vous ne luy parlerez point, interrompit ce Prince, pour l’obliger à parler pour Abradate ? je ne le pourrois pas, luy repliqua t’elle, & je vous tromperois, ſi je vous le promettois.
Cependant Perinthe aprenant comme les autres, que Mexaris parloit comme devant bien toſt eſpouser Panthée : & sçachant de plus, par le Prince de Claſomene, qu’en effet Mexaris l’aſſuroit qu’il n’eſtoit plus en termes de craindre que Creſus ne vouluſt choquer, comme il euſt fait du Prince Atys, ou devant la priſon