Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/337

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d’aprendre quelque choſe de Mazare, ſans en pouvoir rien sçavoit en Capadoce : apres quoy je fus à Artaxate, pendant que l’Armée de Ciaxare croyoit que Mandane eſtoit enfermée dans un Chaſteau au bord de l’Araxe. Et comme je le croyois auſſi bien que les autres, & que je m’imaginois que ſi le Prince Mazare vivoit, il eſtoit à Artaxate auſſi bien que moy, je paſſois les journées entieres à aller de Temple en Temple, & par toutes les Places publiques, pour voir ſi je ne le trouverois point. Apres, quand on faiſoit quelques reveuës de Troupes, j’allois encore regarder Soldat à Soldat, pour voir ſi je ne le trouverois point : car je croyois l’amour de ce Prince capable de luy faire toutes choſes. Il me vint en ſuitte dans la fantaiſie, voyant que je ne le rencontrois en nulle part, que peut-eſtre auroit il eſté aſſez adroit, pour trouver les voyes d’entrer dans ce Chaſteau où l’on croyoit qu’eſtoit la Princeſſe Mandane, & où eſtoit alors la Princeſſe de Pont devant qui je parle : de ſorte que je me reſolus d’attendre en ce lieu là, qu’el ſeroit l’evenement de cette guerre : n’y ayant pas aparence que je puſſe trouver ailleurs le Prince que je cherchois. En effet, Seigneur, (dit Orſane, adreſſant la parole à Cyrus) j’y fus juſques à ce que par voſtre incomparable valeur, vous euſtes pris ce Chaſteau avec fort peu de Troupes, à la veuë d’une des plus grandes Villes du monde, & d’une multitude innombrable de gens armez. De vous dire la douleur que j’eus, de sçavoir que la Princeſſe Mandane n’eſtoit point dans ce Chaſteau, il ne me ſeroit pas aiſé : eſtant certain que je penſe vous pouvoir aſſurer ſans menſonge, avec tout le reſpect que je vous dois, que vous ne fuſtes gueres