Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/455

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aprochant de Suſe par cét endroit, on trouve une petite eminence, d’où on deſcouvre une grande Prairie, qui contient plus de cent ſtades au milieu de laquelle paſſe en ſerpentant le Fleuve Choaſpe, dont les eaux ſont ſi pures, que celles des Fontaines les plus vives & les plus fraiches, ne les égallent pas. Au bord de ce Fleuve eſt la Ville de Suſe, que grand nombre de Palais magnifiques font paroiſtre auſſi belle par dehors, qu’elle l’eſt par dedans : & ce qui rend ſon abord plus agreable, & ſon ſejour plus ſain, eſt que toute cette grande Prairie, auſſi bien que les deux bords de la Riviere, ſont entierement couverts d’Iris de mille couleurs differentes : qui par un Eſmail admirable, charment les yeux par leur diverſité, & parfument l’air de leur odeur, qui ne reſſemble point du tout celle des autres Iris que l’on trouve ailleurs, Auſſi eſt-ce par l’abondance de ces belles fleurs, que la Ville de Suſe prend ſon Nom : car en noſtre langue l’un ſignifie l’autre : & c’eſt pour cela que l’on apelle ces Iris par toute l’Aſie, Iris de Suſe. De plus, en arrivant du coſté par où Hermogene mena Beleſis, on trouve le long de ce beau Fleuve, quatre grandes Allées ſi droites, & ſi ſombres, par la hauteur des Abres qui les forment, quoy qu’il n’y en ait pas beaucoup en tout le reſte du Pais, que l’on ne peut pas voir une promenade plus agreable que celle la. Auſſi eſt-ce le lieu où toutes les Dames vont le ſoir, dans de petits Chariots deſcouvers : & où tous les hommes les ſuivent à cheval : de ſorte qu’ayant la liberté d’aller tantoſt à l’une & tantoſt à l’autre, cette promenade eſt tout enſemble promenade & converſation, & eſt ſans doute fort divertiſſante. Comme Hermogene avoit eu deſſein