Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/50

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d’abord qu’elle la vit : ſi bien que la prenant aveque joye, genereux Inconnu, luy dit elle, ſi ce que vous me rendez ne m’avoit pas eſté donné par la Princeſſe de Lydie, & que vous n’euſſiez pas l’air qui paroiſt ſur voſtre viſage, je devrois du moins vous offrir la Boiſte & ne recevoir que la Peinture. Mais ne pouvant faire une liberalité, de celle d’une ſi Grande Princeſſe, principalement à un homme fait comme vous : recevez du moins ma reconnoiſſance, juſques à ce que j’aye trouvé les moyens de vous la teſmogner par quelque ſervice auſſi important, que celuy que vous me rendez m’eſt agreable. Madame, luy reſpondit il, c’eſt un ſi grand plaiſir que celuy d’en cauſer à une perſonne faite comme vous, que je me tiens pleinement recompenſé, de celuy que je viens de vous donner, en vous rendant une choſe qui vous eſt chere. Pendant que la Princeſſe & cét Eſtranger parloient ainſi, Perinthe s’eſtant aproché d’un des ſiens, & luy ayant demandé qui il eſtoit ? il luy aprit que c’eſtoit le ſecond Fils du Roy de la Suſiane, nommé Abradate : & Fils d’une Sœur de Creſus, qui s’en alloit à Sardis. De ſorte que Perinthe me l’ayant dit, j’en advertis la Princeſſe, à qui je le dis tout bas : pendant quoy celuy des gens d’Abradate à qui Perinthe avoit parlé, & qui avoit sçeu par luy qui eſtoit la Princeſſe, le dit a ſon Maiſtre durant que je luy diſois à elle qui il eſtoit. Si bien que ſe connoiſſant tous deux, pour ce qu’ils eſtoient, il en parut beaucoup de joye dans leurs yeux. Abradate redoubla ſon reſpect, & la Princeſſe ſa civilité : je m’eſtime bienheureux, luy dit il, d’avoit pû plaire un inſtant de ma vie, à une ſi belle Princeſſe : & je m’eſtime tres heureuſe, repliqua t’elle, d’eſtre obligée le reſte de la mienne à un ſi