Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/603

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

long, ſi vous mouriez ſi toſt : mais encore, parce qu’il ſuffit que vous deſiriez quelque choſe, pour faire que je ne vous l accorde pas. Quoy qu’il en ſoit, Madame luy dit il, quand ce ne ſeroit que pour me faire des reproches, vous me devez entendre & m’entendre auequc loiſir. Pendant que ces deux Perſonnes parloient ainſi, celle qui avoit trompé Cleodore en l’amenant dans ce Palais, apella une de ſes Parentes qui eſtoit demeurée dans la Galerie avec leurs Femmes, & comme elle sçavoit la choſe, elles s’amuſerent à regarder les Peintures de la Chambre qui touchoit ce Cabinet. De ſorte que Beleſis pouvant parler ſans eſtre entendu que que de Cleodore, ſouffrez (Madame, luy dit il, apres qu’elle ſe fut aſſiſe) qu’auparavant que de vous demander pardon, je vous aſſure que ce Beleſis que vous voyez à vos pieds, eſt ce meſme Beleſis que vous diſtinguiez autreſfois aſſez favorablement de tout le reſte du monde. Je le fais encore aujourd’huy, interrompit elle, & je vous tiens en effet, ſi différent de tous les autres hommes, que je ne doute nullement que vous ne ſoyez incomparable. Quoy qu’il en ſoit, dit il, je ſuis pourtant ce que j’eſtois en une choſe, qui eſt que je n’eus jamais plus d’amour pour vous que t’en ay. Pluſt aux Dieux, luy repliqua t’elle, que ce que vous dittes fuſt vray : eh pluſt à ces meſmes Dieux que vous invoquez, reprit il, que vous le deſiraſſiez effectivement ! non non Beleſis, reſpondit Cleodore, je ne m’eſloigne point de la verité, quand je dis que je ſerois ravie que vous m’aimaſſiez eſperdûment : mais vous vous eſloignez eſtrangement de mon ſens, ſi vous croyez que je faſſe ce ſouhait pour recevoir voſtre affection : puis qu’au contraire je ne voudrois que vous m’aimaſſiez,