entour de ces Autels ; de ces feux ; & de ces victimes ſanglantes, eſtoient deux cens hommes l’Eſpée nuë à la main : en ſuitte dequoy apres avoir fait jurer tous les Capitaines, de ne quitter le combat que morts ou victorieux, on apella les uns apres les autres, au milieu de ces feux, de ces Autels, de ces victimes, & de ces hommes qui avoient l’Eſpée nuë à la main, on leur fit promettre & jurer, avec des paroles terribles, & en faiſant des imprecations ſur eux, & ſur toute leur poſterité ; de ne manquer à rien de tout ce que Creſus leur commanderoit, ou leur feroit commander par leurs Capitaines. Apres cela on leur fit encore promettre en particulier, de ne fuïr point de la Bataille ; de tüer ceux de leurs compagnons qui voudroient reculer d’un pas ſeulement ; & de ſe reſoudre à la mort, pluſtoſt que de ne remporter pas la victoire. Et comme il y en eut quelques uns, qui eſpouventez d’un ſi eſtrange Sacrifice, & d’une ſi ferme reſolution, ne voulurent pas jurer ; ces hommes qui avoient l’Eſpée nuë à la main, les tuërent ; & par un exemple ſi cruel, & ſi terrible, porterent tous les autres à promettre ce qu’on leur demandoit, quoy que peut-eſtre ils n’euſſent pas tous envie de le tenir. Neantmoins comme les choſes d’aparat touchent extrémenent le cœur de la multitude, les Soldats de l’Armée de Creſus en general creurent eſtre devenus plus vaillans apres cette ceremonie, qui finit par des aſſurances que les Sacrificateurs donnerent par force, qu’ils ne voyoient que des ſignée favorables à toutes les victimes : ſi bien que l’eſperance ſuccedant à la crainte, l’Armée de Creſus commença de ne douter plus de l’heureux ſuccés de la Bataille.
Cependant le Roy