ce que je suis, ce seroit encore confirmer le Roy dans l’opinion qu’il a, que j’en veux à sa Couronne : puis qu’en fin je ne suis pas nay si loin du Throsne qu’il se l’imagine. Helas ! disoit il, quel pitoyable destin est le mien ? Je crains autant ma justification, qu’il est naturel de la desirer : & la peur d’offenser ma Princesse, est plus puissante en moy, que la crainte de l’infamie : quoy que la crainte de l’infamie soit le plus grand de tous les maux, pour quiconque cherit la Gloire, au point qu’Artamene la cherit. Je ne pense pourtant pas estre condamnable d’en user ainsi : car enfin quelque passion que j’aye pour la Princesse, je ne ferois pas un crime pour la contenter : mais aussi quelque amour que je puisse avoir pour cette Gloire, je n’offenseray jamais la reputation de Mandane, plustost que de laisser soubçonner la mienne. Non, non, disoit il, nostre vertu ne doit point despendre d’autruy : & quand nous sommes assurez du tesmoignage de nostre propre conscience, & de celuy de nos plus mortels Ennemis ; il faut ne se mettre pas en peine du reste. Les Dieux qui sont les Protecteurs de l’innocence oprimée, auront soing de faire connoistre la mienne apres ma mort sans que je m’en mesle : ceux qui souffrent que l’on m’accuse, sçauront bien me justifier, par des voyes que je ne sçaurois moy mesme comprendre : & la verité se trouvera la plus forte.
Mais pendant qu’Artamene & Ciaxare sont si occupez en eux mesmes ; toute Cour, & toute l’Armée, ne le sont pas moins en cette occasion : le Roy de Phrigie ; le Roy d’Hircanie ; le Prince des Cadusiens ; celuy de Licaonie, & celuy des Paphlagoniens ; Hidaspe ; Chrisante ; Aglatidas ; Thrasibule ; Madate ; Megabise ; Adusius ; Artabase, &