fut impossible de continuer de combattre, & d’achever de gagner la Victoire. Vous sçavez aussi, comment en assiegeant la Ville de Ninos, dont je vous ay desja parlé, pour vanger la mort de Phraorte son pere, qui comme je l’ay dit, avoit esté tué devant cette Ville : & qu’estant tout prest de la prendre ; Madias Roy des Scithes, parut avec une Armée de plus de cent mille hommes, à la portée d’une fléche de son Camp. Enfin, Seigneur, vous sçavez que ce Prince combatit le Roy des Medes, qui perdit la Bataille avec l’Empire : mais vous sçavez aussi, qu’il remonta sur le Throsne ; que cette invasion des Scithes ne dura que vingt-huit ans : & que n’ayant pas changé de sentimens en changeant de fortune, il recommença la guerre contre les Rois d’Assirie ; & qu’il prit enfin cette Ville de Ninos. Or, Seigneur, ce premier Ciaxare, fut pere d’Astiage, qu’il laissa paisible possesseur de ses Estats : Mais comme ce Prince estoit nay dans un temps de troubles & de divisions ; je pense que les troubles & les agitations de l’esprit du pere, pendant de si grandes revolutions ; passerent dans l’ame du fils : & y laisserent certaines impressions melancoliques & défiantes, qui ont fait passer toute la vie de ce Prince, avec beaucoup d’inquietude ; & qui ont peut-estre causé en partie, toutes les traverses de celle d’Artamene. Il fut marié assez jeune ; & d’une façon sans doute assez extraordinaire, pour m’en devoir souvenir icy. Cette Bataille que le Roy son pere n’avoit pû gagner contre Aliatte Roy de Lydie, à cause de cette obscurité qui s’estoit espanduë sur toutes les deux Armées, fut cause des Nopces dont je vous parle : car apres un accident si estrangge, le Roy des Medes consulta les Mages, & Aliatte envoya au Temple de
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