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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/198

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moy fusmes voir une Fille illustre, appellée Sapho, que toute la Grece admire : & qui est sans doute admirable, & par sa beauté ; & par les Vers qu’elle compose. Mais, Seigneur, pour venir promptement au point le plus important de mon recit ; je vous diray en peu de mots, qu’estant arrivez au Pont Euxin, nous n’avions pas marché trois jours & trois nuits, que le fameux Corsaire accoustumé à attaquer les autres, fut attaqué par six Vaisseaux. Ce combat ayant esté tres long & tres opiniastre, Artamene qui voulut combattre, y fit des actions si admirables, que la modestie de l’illustre Pyrate, luy fit dire apres le combat, qu’il luy devoit la victoire. Et en effet, il se sentit si estroitement obligé à mon Maistre ; que de trois Vaisseaux qu’il avoit pris, il voulut luy en donner deux. Mais Artamene n’en voulut prendre qu’un ; avec lequel il eut dessein de s’en aller regagner l’Helespont, & la Mer Egée, pour se rendre à Ephese, suivant son intention ; & de là renvoyer à Periandre le Vaisseau qu’il acceptoit, en eschange du sien, qui avoit esté coulé à fonds dans le dernier combat. Il se separa donc du genereux Pyrate, sans estre connu de luy, & sans le connoistre : car comme ils avoient tous deux resolu de ne se descouvrir pas, ils n’osoient se demander l’un à l’autre, ce qu’ils ne se vouloient pas dire. Ainsi leur amitié, quoy que grande, fit qu’ils ne se presserent que mediocrement, sur une chose qui leur tenoit pourtant fort au cœur : & la retenuë de mon Maistre fut telle en cette rencontre ; qu’il combatit, sans demander seulement pourquoy il avoit combatu ; ny qui il avoit combatu ; parce qu’il remarqua, que le genereux Pyrate, en vouloit faire un mystere. Artamene reprenant donc Feraulas & moy, &