Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/232

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peut faire endurer de rigoureux, auparavant qu’il eust seulement dit qu’il aimoit ; il falut se resoudre à cette absence, & s’en consoler par l’espoir de la victoire & du retour. Mon Maistre se rangea donc dans l’Escadron des Volontaires : tant pour camper, & pour combatre, plus prés de la personne du Roy ; que parce que dans ces Troupes qui n’obeïssent qu’au General mesme, & qui n’ont point de Capitaine particulier ; il est plus aisé de cacher qui l’on est : & plus aisé encore à ceux qui se veulent signaler, par des actions extraordinaires, d’en pouvoir trouver l’occasion. L’Armée de Ciaxare estoit composée de quarante mille hommes, & celle des Ennemis de cinquante mille : je ne m’amuseray point, Seigneur, à vous dire le nombre des gens de trait ; ny de ceux qui lançoient le javelot ; des gens de pied, ou des gens de cheval ; puis que cela ne serviroit de rien à mon discours : & qu’ayant encore tant de Combats, & tant de Batailles à vous raconter ; il n’est pas juste que je m’estende beaucoup à celle-cy : car enfin, ce n’est pas l’Histoire de Capadoce que je compose ; c’est celle d’Artamene que je vous raconte. Je vous diray donc seulement, que les deux Armées estant en presence, je ne vy jamais Artamene si content : il estoit armé ce jour là, d’une façon assez remarquable : ses Armes estoient brunies, & toutes couvertes de flames d’or. Son pennache ondoyant, & tombant jusques sur la croupe de son cheval, estoit d’une couleur de feu, tres vive : & ce cheval suivant l’usage du Païs, estoit tout bardé de mailles d’acier, moitié brunies & moitié dorées. Artamene voulut porter deux javelines à la main gauche, avec son bouclier au mesme bras : une autre javeline