Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/240

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les loüanges de vostre Majesté, comme un moyen fort propre à m’exciter à bien faire, que comme une legitime recompense, du petit service que je luy ay rendu en cette journée. Je voy bien, luy respondit Ciaxare, que vous estes difficile à vaincre en toutes choses : c’est pourquoy j’ay quelque crainte de vous demander, quelle Terre vous a veû naistre, de peur que vous ne le veüilliez pas dire. Seigneur (luy repartit Artamene, suivant ce que nous avons resolu en partant de Sinope, & que j’avois oublié à vous apprendre) je suis d’un Païs où il semble que l’on soit obligé d’estre sage & vaillant dés le Berçeau : & c’est ce qui fait sans doute que j’ay quelque peine à me resoudre de vous le nommer, auparavant que je me sois rendu digne d’estre advoüé par ma Patrie : & que je me sois mis en estat par mes actions, de ne luy faire point de honte. Ne laissez pas de satisfaire ma curiosité (luy repliqua Ciaxare en sous-riant) car quand vous seriez Grec ou Persan, qui sont à mon advis les deux Nations de toute la Terre, ausquelles peut mieux convenir, l’idée que vous nous avez donné de vostre Païs ; & quand vous seriez Fils du plus Grand, & du plus sage Roy du Monde ; il luy seroit advantageux, de vous advoüer pour tel. Artamene ayant seulement respondu à ce discours, par une profonde reverence ; puis que vous me l’ordonnez, luy dit il, je vous advoüeray, Seigneur, que ma naissance est assez illustre : & que je suis de plus, d’une des plus considerables Parties de toute la Terre. De vous dire maintenant, Seigneur, ny le nom de mes Parens ; ny precisément le lieu qui m’a vû naistre ; c’est ce que je ne puis, ny ne dois pas faire :