Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/244

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Gloire. C’est pourquoy si vostre Majesté me le permet, j’iray faire son Panegyrique à la Princesse : Moy, dis-je, qui ay esté le tesmoin de sa valeur, & un des plus grands Admirateurs de son courage. Artamene entendant ainsi parler Philidaspe, eut peur qu’on ne luy accordast ce qu’il demandoit : c’est pourquoy sans donner loisir au Roy de respondre, Seigneur, luy dit il, comme les actions de ce genereux Estranger, sont bien plus illustres que les miennes ; il est bien plus juste qu’elles ne soient pas ignorées de la Princesse ; & c’est pour cela, que ne m’opposant plus au dessein de vostre Majesté, j’accepte la Commission qu’elle m’a fait l’honneur de me donner : estant plus equitable qu’au lieu qu’il face mon Panegyryque, je m’en aille faire son Eloge. Seigneur (repliqua Philidaspe en changeant de couleur) il y va de la gloire d’Artamene de le refuser : il y va de celle de Philidaspe, respondit mon Maistre, de ne l’escouter pas. Le Roy prenant plaisir à cette agreable contestation, dont nous avons depuis sçeu la cause, & que nous ignorions alors ; voulut pourtant la terminer : & pour les mettre d’accord, je veux, dit il à Artamene, profiter des advis de Philidaspe : & me precautionner contre vostre modestie. Je veux donc qu’Arbace le Lieutenant de mes Gardes vous accompagne : afin qu’il die, ce que vous ne direz pas. Le Roy s’estant fait donner d’autres Tablettes, changea sa Lettre, & la donna à Artamene, qui la reçeut avec autant de joye, que Philidaspe en eut de dépit. Mon Maistre donc ravy de cette heureuse rencontre, prit la Lettre du Roy, que ce Prince luy bailla ouverte : & si je ne me trompe, elle estoit à peu prés conçeuë en ces termes.