Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/488

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où j’avois demeuré un jour : lors que j’avois pris congé d’Amestris, & que j’avois trouvé tout disposé, à recevoir des presens : & à me rendre un pareil office si j’en avois besoin. Je partis donc, avec un de mes gens seulement : & faisant le plus de diligence qu’il me fut possible, j’arrivay proche d’Ecbatane, sans que le bruit de mon départ peust estre parvenu jusques à mon Pere, ny jusques à Amestris : parce que j’avois obligé celuy qui m’avoit donné retraite, à ne l’escrire point à la Cour. Je voulus arriver de nuit, afin de n’estre pas reconnu : & ayant envoyé mon Escuyer s’assurer du logement que je m’estois destiné ; je fus en suitte dans le Jardin : resolu de m’envoyer informer secrettement, de ce que faisoit Amestris, auparavant que de la voir, apres que celuy qui me servoit, auroit mené mes chevaux à un Vilage proche de là. Je passay toute la nuit à me promener au mesme lieu où je l’avois veuë la derniere fois : & repassant dans ma memoire, toutes les favorables paroles que j’avois entenduës de sa belle bouche ; j’estois dans une satisfaction, que je ne vous puis exprimer. Je ne sçay par quel charme secret, ce beau lieu appaisa tous les troubles de mon ame : mais il est certain que depuis que j’y fus, je n’eus plus ny jalousie, ny chagrin : & que je n’eus plus d’autre inquietude, que celle que me causoit l’impatience que j’avois de revoir Amestris. Bien est-il vray qu’elle fut si grande, que comme je l’ay desja dit, je passay toute la nuit à me promener : m’estant impossible de concevoir que je pusse dormir. Or comme je ne pouvois faire sçavoir à Amestris que j’estois arrivé que par ma parente, il falut attendre qu’il fust jour : mais j’eus le malheur d’apprendre lors que j’y envoyay, qu’elle estoit