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Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/575

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les yeux abaissez : puis les relevant tout d’un coup, avec une melancolie extréme. Ne vous justifiez pas davantage, me dit elle, car vous ne l’estes desja que trop dans mon esprit : & laissez moy employer le peu de moments qui me restent pour vous entretenir, à vous dire avec ingenuité, mes veritables sentimens. Je voudrois bien, luy dis-je, Madame (si cela se peut sans perdre le respect que je vous dois) vous suplier auparavant, de ne me desesperer pas, & de me laisser mourir, avec un peu moins de violence. Je voudrois bien mesme, pousuivis-je, vous demander, pourquoy lors que vous m’avez creû coupable, vous vous en estes vangée sur vous mesme ? Ne pouviez vous trouver un suplice où je souffrisse seul la peine que vous pensiez que je meritois ? Que ne m’ordonniez vous plustost de mourir à vos yeux ? Et pourquoy Madame, faloit il vous rendre malheureuse pour me punir ? Il le faloit, me respondit elle, parce que je ne pouvois selon mon opinion, vous rendre malheureux de cette sorte, sans me justifier dans vostre esprit : & que je ne croyois pas le pouvoir faire plus seurement qu’en espousant Otane, que vous sçaviez bien que je n’aimois pas : & dont je sçavois bien assurément que vous n’estiez point jaloux. Ha Madame, luy dis-je, que venez vous de me dire ? Et faloit il qu’Aglatidas entendist encore de vostre bouche, de si cruelle paroles ? Quoy Madame, Otane, ce mesme Otane que j’ay veû estre l’objet de vostre aversion, peut il estre Mary d’Amestris ? Ouy, me respondit elle, puis qu’Aglatidas l’a voulu : de grace Madame, luy dis-je, ne m’attribuez pas un pareil sentiment : & croyez au contraire, que si vous laissiez agir librement Aglatidas, Amestris ne seroit pas long