Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/582

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rencontre autant que je le pourrois : la cause de nostre derniere querelle, n’ayant esté sçeuë de personne : non pas mesme de Megabise, qui a tousjours ignoré ce que j’avois veû, dans ce malheureux Jardin du Parterre de gazon. Pour ce qui est d’Anatise, je partis d’Ecbatane, auparavant qu’elle fust revenuë des champs : ainsi je ne vous puis dire ce qu’elle aura pensé de moy. J’escrivis en partant une lettre à Amestris, que j’envoyay à Menaste, de laquelle je n’ay point eu de response. Je fus quelque temps à errer de Province en Province, sans sçavoir ce que je voulois faire, ny ce que je pretendois devenir : jusques à ce que la guerre d’Assirie commençant, je creus que je devois y chercher la fin de mes malheurs, en y cherchant une mort honnorable. Durant tout ce temps là, je n’ay jamais reçeu nulles nouvelles, ny d’Amestris, ny de Menaste, quoy que j’aye fait toutes choses possibles pour obliger l’une ou l’autre à m’en donner.

Et depuis cela Seigneur, vous avez esté le tesmoin de mon chagrin, quoy que vous n’en sçeussiez pas la cause : & depuis cela encore, je n’ay non plus rien apris d’Amestris, sinon que j’ay sçeu par Araspe, qu’Otane est tousjours vivant ; qu’elle est tousjours malheureuse : & que selon les apparences, veû la melancolie qui paroist sur son visage, elle aime peut-estre encore l’infortuné Aglatidas. Voila Seigneur, qu’elle est l’advanture que vous avez desiré d’aprendre, & quels sont les malheurs de l’homme du monde qui souhaitteroit le plus, de voir bien tost finir les vostres : & qui n’attend plus que la mort, pour le guerir de tous les siens. A ces mots, Aglatidas s’estant teû, Artamene le remercia, de la peine qu’il avoit prise ; luy