Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, première partie, 1654.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

luy arracher la Couronne ; & il ne songeoit pas à conserver celle qui la devoit perdre en perdant la vie. Car n’en doutons point, dit il à Artamene, Mandane n’est plus : & l’esperance est un bien, où nous ne devons plus pretendre de part. Mais du moins, adjousta t’il, cette Innocente Princesse ne demeurera t’elle pas sans vangeance : & les Dieux qui ont fait perir Mazare, l’un de ses Ravisseurs ; nous enseignent ce que nous devons faire du Roy d’Assirie. Il mourra, poursuivoit il, il mourra : & comme il est cause que la Race de l’illustre Dejoce est esteinte en la personne de ma fille, il faut que celle des Rois d’Assirie le soit en la sienne : & les Dieux ; non, mesme les Dieux, ne sçauroient l’empescher de mourir ; ny le dérober à ma colere.

Artamene surpris de ce discours, & regardant le Roy ; Seigneur, luy dit il, n’avez vous pas vû celuy que je vous ay envoyé, pour vous advertir de la fuite de ce Prince ? Que dites vous, Artamene, que ce Prince ?…… reprit brusquement le Roy. Je dis, Seigneur, luy respondit il, que j’ay envoyé advertir vostre Majesté de sa fuite. Quoy, interrompit Ciaxare, le Roy d’Assirie n’est plus en mon pouvoir ! Le Roy d’Assirie est en liberté ! Ha ! non, non, cela n’est pas possible ; & je ne le croiray pas facilement. Je ne croiray, dis-je, pas facilement, qu’Artamene ait laissé eschaper un Prisonnier de cette importance. Il est pourtant vray, respondit froidement Artamene, que mon malheur & : sa bonne fortune ont voulu qu’il s’échapast, malgré les Gardes que je luy avois donnez : Mais, Seigneur, que cela ne vous inquiete pas tant : car s’il m’estoit aussi aisé de vous faire revoir la Princesse, qu’il me sera peut-estre facile de donner la mort à cét Ennemy de vostre Majesté ; vostre