Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, quatrième partie, 1654.djvu/26

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le Roy de Pont ? que comme le nombre n’eſtoit pas eſgal, preſque tous mes compagnons y perirent : & que l’y fus bleſſé en quatre endroits, ſans pouvoir empeſcher que ce Prince (qui d’abord s’eſtoit jetté à terre l’Eſpée à la main, & qui fit des choſes prodigieuſes) n’emmenaſt la Princeſſe : qui eut du moins la conſolation d’avoir Marteſie avec elle. Mais pour ſa Parente, comme c’eſtoit une perſonne qui eſtoit mariée, Marteſie obtint du Roy de Pont la permiſſion de la renvoyer chez elle : ce qu’il fit, priant ce Capitaine du Chaſteau, de la faire conduire au lieu où ſon Chariot l’eſtoit allé attendre. Pour moy, Seigneur, quoy que je fuſſe tres bleſſé, je ne laiſſois pas encore d’aller apres quelques Cavaliers, & de les ſuivre l’Eſpée à la main : lors qu’il en vint deux, qui par les ordres de la Princeſſe empeſcherent qu’on ne me tuaſt : & me faiſant priſonnier ils me remenerent tous enſemble à ce Chaſteau, avec priere à ce Capitaine de me bien traiter, & de me faire penſer aveques ſoing ; ce qu’il fit tres civilement. Pendant que je fus chez luy, j’apris qu’il eſtoit nay Sujet du Roy de Pont : & que par diverſes avantures, il s’eſtoit marié en ce païs là : & y eſtoit devenu Gouverneur de ce Chaſteau, qui eſt ſcitué en Paphlagonie : & où le Roy de Pont s’eſtoit veû contraint d’aborder, le lendemain que Marteſie & Orſane furent laiſſez le long du rivage : parce que la Princeſſe s’en affligea ſi fort, qu’elle en tomba malade à l’extremité. Cependant, Seigneur, je n’ay pas pluſtost eſté guery, que je ſuis allé à Suſe : où ce Capitaine avec qui je fis aſſez grande amitié durant que je fus chez luy, m’aſſura que je trouverois la Princeſſe. J’y fus donc, & je la trouvay en effet : & comme le Roy de Pont ne pouvoit