Aller au contenu

Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, quatrième partie, 1654.djvu/371

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

deux journées d’Ecbatane, il fut avec un Eſcuyer ſeulement, au lieu où eſtoit Ameſtris. Cependant ſon départ donna une joye incroyable à Megabiſe, à Tharpis, & à Artemon : il en donna auſſi à Anatiſe, mais non pas tant qu’aux autres : car elle avoit pretendu rompre ſeulement le Mariage d’Ameſtris, & non pas exiler Aglatidas. Neantmoins ayant eu le plaiſir de détruire la felicité d’un homme qui troubloit la ſienne, & celle d’une redoutable Rivale elle jouïſſoit avec aſſez de tranquilité du fruit de ſa fourbe : & Dinocrate poſſedoit auſſi avec beaucoup de : ſatisfaction les preſents que Tharpis luy avoit faits. Mais, Seigneur, pour en revenir à Aglatidas, il fut donc où eſtoit Ameſtris, pour luy dire le dernier adieu : elle en fut ſi ſurprise, & : d’abord ſa en colere, que Menaſte m’a aſſuré qu’il penſa remonter à cheval, ſans luy avoir pû dire quatre paroles : mais qu’enfin il obtint par ſes perſuasions la liberté d’eſtre encore une heure aupres d’Ameſtris : pendant laquelle il ne pût pourtant jamais luy faire changer de reſolution. Cette derniere ſeparation fut encore plus tendre que l’autre : & Aglatidas partit ſi deſesperé, & Ameſtris demeura ſi affligée, qu’on ne peut s’imaginer rien de plus pitoyable.

Quand Aglatidas fut party, Ameſtris qui ne pouvoit parler que de ſon affliction, ſe mit à repaſſer tous les malheurs de ſa vie : & les comparant à celuy qui luy venoit d’arriver, elle trouvoit qu’il eſtoit infiniment plus grand que tous les autres. De ſorte que s’abandonnant à la douleur, elle avoit le viſage tout couvert de larmes : qui tomboient avec une telle abondance, que non ſeulement elles couloient de ſes yeux ſur ſes jouës, mais encore de ſes jouës ſur ſa gorge. Eſtant