Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/121

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Tant que je seray vivant, luy repliqua mon Maistre, ne craignez rien de Philidaspe ; & soyez s’il vous plaist persuadée, Madame, que je ne prens pas moins d’interest que vous, à destruire ses mauvais desseins. je vous en suis bien obligée, reprit la Princesse, mais ne perdons pas davantage de temps ; & allons trouver le Roy. je ne sçay, Madame, adjousta mon Maistre, si le zele que j’ay pour vous, ne m’a point fait manquer au respect que je dois avoir pour luy : & s’il ne trouvera point mauvais, que je vous aye apris la temeraire entreprise de Philidaspe, avant que de l’en advertir. Ce que vous dites n’est pas absolument sans aparence, respondit la Princesse ; c’est pourquoy il luy faut dire que je vous ay rencontré fortuitement, comme vous veniez luy aporter ces Tablettes : & que vous m’avez dit en me donnant la main, ce qu’il y a d’escrit dedans. La Puissance Souveraine, adjousta-t’elle, est delicatte & sensible : & quelques droites qu’ayant esté vos intentions en cette rencontre, il pourroit estre que le Roy n’agréeroit pas vostre procedé : de sorte qu’il est à propos, de luy dire cét innocent mensonge. Ils furent donc à l’Apartement de Ciaxare, & luy aprirent ce qu’ils sçavoient, de la maniere dont ils estoient convenus : Artamene envoya mesme querir ce Capitaine, qui luy avoit aporté ces Tablettes : afin que le Roy entendist de la propre bouche de cét Officier, tout ce qu’il avoit apris de la chose. Ciaxare connoissant l’escriture de Philidaspe, ne douta point du tout qu’il n’y eust une dangereuse conjuration : il se souvint mesme avoir sçeu que le Prince d’Assirie n’estoit point à Babilone depuis un tres long temps : & se confirma