Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/129

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mais elle y estoit suivie de tant de monde, qu’il estoit impossible à mon Maistre de luy parler que des yeux : encore estoit-ce un langage qu’elle ne vouloir pas entendre, & où elle ne vouloit point respondre : estant certain que depuis le recour d’Artamene, elle avoit esvité ses regards avec beaucoup de soing. Il arriva pourtant enfin que le Roy ayant voulu entretenir la Princesse en particulier en ce lieu là ; tout le monde se retira par respect à un costé du Jardin : & comme cette conversation fut longue, peu à peu ceux qui n’estoient pas absolument attachez à la personne du Roy, ou à celle de la Princesse s’en allerent : Si bien que comme le Roy vint à partir, il n’y eut plus qu’autant de gens qu’il en faloit pour l’accompagner. Mon Maistre voulant le suivre, & Ciaxare voyant que la Princesse demeuroit seule avec ses Femmes Non, luy dit il Artamene, je veux que vous entreteniez ma Fille : & que vous demeuriez pour la divertir, dans la Solitude où je la laisse. Ce Prince ravy de ce commandement, y obeit avec joye : & la Princesse surprise de cette avanture, n’eut pas le loisir de trouver un pretexte pour l’empescher. Elle regarda alors en diligence, si Martesie n’estoit pas aupres d’elle : mais elle ne la vit point. Car il estoit arrivé que cette Fille ayant veû d’abord toute la Cour dans ce Jardin, n’avoit pas creû qu’elle fust necessaire pour empescher Artamene de parler à Mandane : de sorte qu’ayant quelque affaire, elle estoit allée y donner ordre. Il estoit bien demeuré quatre ou cinq de ses Compagnes aupres de la Princesse ; Neantmoins comme elles n’avoient pas eu de commandement particulier de ne s’éloigner jamais d’elle,