Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/185

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Ennemis, que de faire Alliance avec eux. Qu’apres tout, il le vouloit : & que s’il n’y consentoit pas, il chercheroit d’autres voyes, d’empescher que son Sceptre ne passast dans les mains d’une Fille.

Voila Seigneur, une partie des choses qu’Araspe avoit dites de la part d’Astiage à Ciaxare. Aribée qui s’estoit trouvé present à ce discours, comme ayant la confidence du Roy, & qui avoit bien des desseins cachez dans l’esprit, demeura un peu estonné, à ce que nous avons sçeu depuis : neantmoins apres avoir fait semblant de resver profondement à ce qu’il devoit conseiller à Ciaxare, qui luy commandoit de dire son advis : il approuva tout ce qu’Astiage avoit mandé ; fortifia la chose par de nouvelles raisons ; exagera celles qu’Araspe n’avoit fait que toucher legerement ; & fit enfin resoudre le Roy à faire ce qu’on luy conseilloit. Ce n’est pas que la tendresse extréme qu’il avoit pour Mandane, ne resistast un peu à ce dessein : mais comme il luy demeuroit deux Couronnes ; & qu’on luy faisoit comprendre, qu’il s’agissoit du Throsne de Medie ; il consentit à ce qu’on voulut. Or comme Aribée avoit interest par plus d’une raison, que mon Maistre fust esloigné de la Cour, il dit à Ciaxare qu’il n’y avoit qu’Artamene seul, qui fust capable de faire reüssir heureusement, le dessein de son mariage, avec la Reine des Massagettes. Qu’il avoit toutes les qualitez necessaires pour cela ; qu’il avoit beaucoup d’esprit, & beaucoup de reputation : & qu’ainsi il n’y avoit presque pas lieu de douter, que si l’on envoyoit Artamene vers Thomiris, il ne vinst à bout d’une negociation si glorieuse pour luy, & si importante pour l’Estat.