Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/246

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Cette blessure fut pourtant assez legere : neantmoins comme elle estoit au bras droit, elle ne laissoit pas de l’incommoder assez. De sorte que craignant de ne pouvoir pas tenir long temps son espée assez ferme ; il se resolut de passer sur mon Maistre, qui ne refusa pas de venir aux prises aveque luy. Indathirse est d’une taille aussi haute que celle d’Artamene : mais il y a je ne sçay quelle vigueur dans le cœur de mon Maistre ; qui redouble sans doute sa force dans les perils : & qui luy fait tousjours r’emporter la victoire. De sorte qu’apres s’estre disputez quelque temps l’avantage de ce combat, Artamene arracha l’espée à Indathirse : & racourcissant la sienne, il le mit en estat de confesser qu’il estoit vaincu.

Artamene & luy s’estant donc relevez, & mon Maistre tenant les deux espées en ses mains. Vous advoüerez, luy dit il, qu’Artamene ne seroit pas absolument indigne de l’affection de Thomiris ? J’advoüeray sans doute, repliqua Indathirse, que vous avez assez de valeur pour la conquerir, & que j’ay trop peu de bonne fortune pour vous la disputer : & je vous advoüeray en suitte (repliqua mon Maistre, luy rendant son espée, & en l’embrassant) que je ne suis point amoureux de Thomiris ; que je ne l’ay point esté ; & que mesme je ne le seray jamais. Quoy, reprit Indathirse, vous n’estes point Amant de Thomiris ? Non, repartit Artamene, de mon consentement je ne feray point d’obstacle à vostre felicité. Mais si cela est, repliqua Indathirse, pourquoy vous estes vous battu ? Pour vous persuader de meilleure grace la verité, respondit mon Maistre, & pour ne vous laisser pas lieu de douter de mon courage. Indathirse fut si surpris & si charmé de la generosité d’