Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/326

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du meſme bonheur. En y allant, ils reſolurent d’aprendre à Artamene, qu’ils sçavoient qu’il eſtoit Cyrus, & qu’ils n’ignoroient pas le reſte de ſes avantures : afin de pouvoir mieux aviſer apres, à ce qu’il eſtoit à propos de faire pour ſa liberté. Ce n’eſt pas que Chriſante & Feraulas n’apprehendaient qu’il n’en fuſt faſché : mais apres tout, la choſe eſtoit faite : & elle avoit paru ſi neceſſaire, qu’ils aimerent mieux s’expoſer à quelques reproches, que de luy déguiſer une verité qu’il faudroit touſjours qu’il sçeuſt. D’abord que ces deux Rois entrerent, Artamene en fut extrémement ſurpris, auſſi bien que de la veüe de Chriſante & de Feraulas : car encore qu’Aglatidas euſt. veû Artamene pendant ſa priſon, nul de ſes domeſtiques ne l’avoit veû : & Andramias avoit fait cette grace particuliere à ſon Parent. Cet illuſtre Priſonnier reçeut ces Princes avec toute la civilité & tout le reſpect qu’Artamene comme Artamene devoit à des perſonnes de cette condition : Mais apres l’avoir ſalüé, & l’avoir obligé d’embraſſer Chriſante & Feraulas, ſans conſiderer qu’ils eſtoient là ; ils luy dirent en ſous-riant, qu’ils venoient pour prendre l’ordre de luy : & pour sçavoit ce qu’il faloit faire pour delivrer Artamene : & pour le mettre en eſtat de faire bien toſt paroiſtre Cyrus. A ces mots, Artamene regarda Chriſante & Feraulas : mais le Roy de Phrigie prenant la parole, non, luy dit il, n’accuſez pas legerement, les deux hommes du mon de que vous devez le plus aimer : & ne ſoyez pas marry que nous sçachions tout le ſecret de voſtre vie. Ils ne nous l’ont pas apris ſans neceſſité : c’eſt pourquoy n’en murmurez pas : & ſoyez aſſuré que ce que nous sçavons, ne vous cauſera jamais aucun mal. je sçay