Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/327

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bien Seigneur, reſpondit Artamene, que Chriſante & Feraulas font touſjours bien intentionnez : & que ſans doute ils ne pouvoient pas mieux choiſir qu’ils ont choiſi, en voſtre Perſonne & en celle du Roy d’Hircanie : mais apres tout Seigneur, il y a des choſes dans mes avantures, que j’euſſe ſouhaité qui n’euſſent jamais eſté sçeües : & que je n’aurois jamais dittes, quand meſme il y auroit eſté de ma vie. Si nous ne vous euſſions pas veû en un danger eminent (interrompit Chriſante avec beaucoup de reſpect) nous aurions gardé un ſecret inviolable : mais nous avons creû que n’ayant rien à dire qui ne vous fuſt glorieux, nous ne devions pas vous laiſſer perir, pluſtost que d’aprendre voſtre innocence aux Rois qui m’eſcoutent Artamene quoy que bien marry que l’on sçeuſt ce qu’il vouloit tenir caché, fut toutefois contraint de ne le teſmoigner pas ſi ouvertement : de peur de deſobliger deux Princes qui s’intereſſoient ſi fort dans ſa fortune. Ils luy dirent alors le changement qu’il y avoit dans l’eſprit du Roy : & ſon opiniaſtreté pourtant, à vouloir preciſément sçavoir, quelle avoit eſté l’intelligence qu’il avoit eüe avec le Roy d’Aſſirie. Puis que vous sçavez toutes choſes, reprit Artamene, vous jugez bien que je ne le dois pas dire : Ce n’eſt pas que je me ſouciasse d’expoſer ma vie en irritant le Roy contre Cyrus. Mais quand je ſonge que je deplairois à la Princeſſe Mandane ; & que je l’expoſerois peut-eſtre à la fureur du Roy ſon pere ; a Seigneurs, je vous avoüe que je n’y sçaurois penſer ſans fremir : & que c’eſt ce que je ne feray jamais. j’aime encore mieux que Ciaxare me croye perfide, que Mandane me ſoubçonne d’indiſcretion. Enfin Seigneurs, vous le diray-je ? ſi j’