Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/330

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luy ordonnant de dire à ce Roy, qu’ayant sçeu que la Princeſſe ſa Fille eſtoit dans ſes Eſtats, il le prioit de la luy renvoyer, avec un equipage proportionné à ſa condition : & qu’en cas qu’il la refuſast il luy declaraſt la guerre. Ce qui fâchoit le plus Ciaxare, c’eſt qu’en effet le Roy d’Armenie avoit refuſe de payer le Tribut qu’il luy devoit : & avoit aporté d’aſſez mauvaiſes raiſons pour s’en exempter. Il ne ſongeoit toutefois pas pluſtost qu’il luy faudroit faire une nouvelle guerre, qu’il regrettoit Artamene : & eſcoutoit aſſez favorablement ceux qui au retour de la priſon où ils l’avoient eſté viſiter, luy diſoient qu’il parloit touſjours de luy avec beaucoup de reſpect & d’affection : & que ſelon les aparences, il eſtoit certainement innocent. Mais apres tout, il vouloit sçavoir ce ſecret impenetrable, qu’on luy faiſoit eſperer de deſcouvrir : dans l’opinion où chacun eſtoit, que cependant la neceſſité où l’on prevoyoit qu’il alloit eſtre, de faire la guerre en Armenie, l’obligeroit à la fin, à paſſer par deſſus ſa premiere reſolution. Durant cela, Artamene ſe ſouvenant de la promeſſe qu’il avoit faite au Roy d’Aſſirie, de l’advertir exactement de toutes choſes, afin de travailler conjoinctement autant qu’ils le pourroient, à la liberté de la Princeſſe ! O Dieux ! (diſoit il en luy meſme, en ſe remettant en memoire tout ce qu’ils s’eſtoient promis) à quelles bizarres avantures m’expoſez vous ? il ſemble que je ne ſois au monde que pour rendre de bons offices au Roy d’Aſſirie : je n’apris ſa premiere conjuration, que pour deſcouvrir ſon amour à Mandane, qu’il n’avoit jamais oſé luy dire : je ne fus parmy les Maſſagettes, que pour faciliter ſa ſeconde entrepriſe : je n’en revins que pour luy ſauver