Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/49

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le Roy, & viendroit le joindre avec les premieres Troupes qui seroient en estat de marcher ; Or Seigneur, dans les sentimens qu’il avoit pour luy, il ne pouvoit se resoudre à luy donner l’avantage de l’avoir desgagé d’un si grand peril. Apres avoir donc bien examiné la chose, il tint Conseil de guerre : mais comme les opinions d’Artamene faisoient tousjours toutes les resolutions des Conseils où il se trouvoit, la Henné fut suivie sans contredit, quoy qu’elle fust extrémement hardie. Il dit donc à tous le Chefs, Que s’ils estoient une fois enfermez, entre l’Armée du Roy de Pont & celle de Phrigie, il n’y avoit plus de salut pour eux. Qu’ainsi il faloit, s’il estoit possible, les combattre separément. Que d’aller attaquer celle du Roy de Pont la premiere, il estoit à craindre que pour peu que l’ennemy tinst la chose en balence, & tardast à donner la Bataille, l’autre Armée ne vinst les enveloper au milieu du combat, & infailliblement les deffaire. Que d’attendre dans leurs retranchemens qu’ils fussent secourus, ce serait attendre une chose sans aparence : qu’ils ne le pouvoient estre à temps : & que sans doute ils y seroient forcez, avant que Ciaxare peust estre à eux. De sorte qu’en l’estat qu’estoient les choses, le mieux qu’ils pouvoient faire, estoit d’aller combattre l’Armée de Phrigie, sans que celle du Roy de Pont s’en aperçeust : & cela par un moyen qu’il en avoit imaginé. Que cette Armée n’estant pas plus forte que la leur ; & estant lasse & fatiguée d’une assez longue marche ; pourroit estre deffaite assez facilement : & les laisser peut estre en termes de faire encore peur au Roy de Pont.