Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/634

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qu’il y avoit quelque choſe de Divin en ce rare Homme. Cependant comme l’intereſt de la Patrie eſtoit plus fort en luy que tout autre intereſt, il partit pour s’en retourner à Athenes : de ſorte qu’il y eut quelques larmes de triſtesse qui interrompirent un peu la joye de Policrite. Mais pour luy laiſſer quelque conſolation, la je une Doride demeura aupres d’elle pour quelque temps : & Cleanthe & Megiſto s’embarquerent avec l’illuſtre Solon. Voila Seigneur, l’eſtat où ce Grand Homme laiſſa la Cour de Chipre : c’eſt à dire le Roy tres content, la Reine Aretaphile tres ſatisfaite ; & Philoxipe & Policrite ſi heureux, que l’on ne peut pas l’eſtre davantage. Peu de jours apres le Prince de Cicilie ayant envoyé demander la Princeſſe Agariſte Sœur de Philoxipe, il la luy accorda : & mit dans les conditions de ſon Mariage, qu’il vous envoyeroit des Troupes, comme le Roy de Chipre vous en avoit deſja envoyé. Et comme ce fut moy qui eus l’honneur de conduire la Princeſſe Agariſte en Cilicie, je me reſolus d’accepter l’employ que l’on m’offrit pour venir icy ; & eſtant retourné en Chipre pour faire mon equipage, le Prince Philoxipe me chargea de vous aprendre ſon Advanture : & de vous ſupplier de ſa part, de ne troubler pas ſon bonheur, en le privant de voſtre amitié, qui luy eſt infiniment chere, & infiniment precieuſe.

Leontidas ayant ceſſé de parler, Artamene l’aſſura, que ſi la felicité de Philoxipe n’eſtoit jamais troublée que par la perte de ſon affection, il eſtoit aſſuré d’eſtre touſjours fort heureux : Thimocrate & Philocles teſmoignerent en ſuitte avoir une ſensible joye, de la ſatisfaction d’un Prince qu’ils aimoient infiniment ; & Artamene en reçeut ſans doute