Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/673

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fait pour moy, bien loin d’avoir eſté fait pour Artamene : & ſi nous eſtions à Themiſcire, il me ſeroit bien aiſé de vous prouver qu’il fut fait autrefois pour la Princeſſe de Pterie, qui mourut ſans l’avoir reçeu. Enfin Marteſie reprit le Roy, ce Portrait ſe trouve dans la Caſſette d’Artamene : & Mandane le luy a ſans doute envoyé par vous, afin de le conſoler de ſon abſence. Non Seigneur, interrompit cette Fille, je ne sçaurois ſouffrir la calomnie des méchans qui vous ont donné cette croyance : & l’appelle tous les Dieux que j’adore à teſmoings, que la Princeſſe ne sçait point qu’Artamene ait ſon Portrait : & que vous ſerez le plus injuſte Prince de la Terre, ſi vous accuſez d’une pareille choſe, la plus innocente & la plus vertueuſe Princeſſe du monde. Mais qu’allez vous fait, reprit il trois jours chez Artucas, auparavant que de me voir ? Marteſie ne pouvant pas bien reſpondre à cette demande changea de couleur : neantmoins s’eſtant bien toſt r’aſſurée, Seigneur, luy dit elle, n’eſtant pas alors en eſtat de paroiſtre à la Cour, je ne pus ſouffrir de vous faire aprendre par un autre ce que j’avois à vous dire : principalement sçachant que vous n’ignoriez pas que la Princeſſe eſtoit vivante. Mais durant ce temps là, reprit le Roy vous avez touſjours veû Chriſante & Feraulas : II eſt vray Seigneur, dit elle, & j’ay taſché de les conſoler de leur douleur : & de leur faire eſperer que vous connoiſtriez enfin l’innocence de leur Maiſtre. Contentez vous, dit ce Prince violent, de cacher la foibleſſe de voſtre Maiſtresse : & ne vous meſlez pas de vouloir juſtifier un temeraire & un ingrat, qui ne ſe ſouvenant plus de la baſſesse de ſa naiſſance, a oſé lever les yeux juſques à ma Fille. Seigneur, reprit Marteſie, quand le Roy d’Aſſure eſtoit