Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/674

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dans voſtre Cour ſous le Nom de Philidaſpe, vous ne le croiyez pas de plus grande condition qu’Artamene. Il eſt vray, repliqua ce Prince, Mais ce beau raiſonnement ne ſuffit pas à me perſuader qu’Artamene ſoit autre choſe que ce que je dis. Encore une fois Seigneur, reprit Marteſie, je croirois pluſtost Artamene fils de Roy que fils d’un Eſclave : Et de quel Roy, adjouſta Ciaxare en colere, de celuy de Phrigie qui n’en a point ? Du Roy d’Hircanie qui n’eſt pas marié ? De celuy d’Armenie qui en : deux que tout le monde connoiſt ? De celuy d’Arrabie qui n’en eut jamais ? De celuy des Saces dont le fils unique a eſte noyé ? Ou de celuy de Perte qui n’a pas retrouvé le lien comme on le diſoit, & qui regrette encore la mort de Cyrus ? Seigneur (interrompit Marteſie que le Nom de Cyrus ſurprit & fit rougir) je ne vous diray point de qui Artamene eſt fils : mais je vous diray bien encore que je ſuis perſuadée que voſtre Majeſté ne le connoiſt pas pour ce qu’il eſt. Le Roy s’emportant alors de colere, voyant que Marteſie ne pouvoit s’empeſcher de prendre le Party de cét illuſtre Priſonnier, luy parla avec beaucoup d’aigreur, & pour la Princeſſe, & pour Artucas, & pour elle meſme. Non non, luy dit il, Artamene n’eſt pas comme Philidaſpe : & je sçavray bien faire la difference d’un Grand Roy à un ſimple Soldat : mais je n’en ſeray point du tout, de Mandane à la fille d’un Eſclave, ny de Marteſie à Mandane. Les Dieux Seigneur, reprit elle, changeront voſtre cœur malgré vous : & vous vous repentirez infailliblement un jour, de ce que vous dittes maintenant. Enfin le Roy ne pouvant tirer nul eſclaircissement par Marteſie, la renvoya, &