Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, seconde partie, 1654.djvu/683

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connue par tout le monde ; dit Leontidas : Qui poſſede toutes les vertus ; adjouſta le Prince de Paphiagonie : Et pour tout dire en peu de paroles, pourſuivit Ariobante ; qui n’a jamais fait aucun mal qu’on luy puiſſe reprocher. Quoy, interrompit alors Ciaxare tout ſerieux, Cyrus n’a jamais fait aucun mal ! et. quand il ne m’en auroit point fait d’auroit, adjouſta t’il, que celuy de ſe rendre ſi puiſſant dans l’eſprit de mes Amis, de mes Ennemis, de mes Alliez, de mes Voiſins, & de mes Sujets, que meſme il me ſemble que je n’oſerois le punir, n’en ſeroit-ce pas un aſſez grand pour le perdre, afin d’apprendre aux autres à avoir plus de reſpect pour moy ? Mais eſt il poſſible, adjouſta t’il, qu’il n’y ait perſonne d’entre vous, qui aime la liberté, & qui haiſſe un homme que tant de Predictions vous doivent faire regarder comme un Tyran ? Cependant, puis que vous ne regardez ny mon intereſt, ny le voſtre, ny celuy de toute l’Aſie ? je ne regarderay auſſi que le mien : & je puniray ſeulement ce pretendu Cyrus comme un homme qui n’eſt venu dans ma Cour que pour me trahir : comme ayant conjuré avec ma Fille contre ma vie : comme ayant laiſſé échaper le Roy d’Aſſirie volontairement : comme ayant une intelligence criminelle aveque luy : & comme un homme enfin qui m’a voulu perdre. Prenez garde Seigneur, dit Hidaſpe, à ce que vous dittes : car apres tout, Cyrus n’eſt pas voſtre Sujet : & le Roy mon Maiſtre sçavra bien trouver les moyens de ſe vanger d’une pareille injuſtice ſi vous la luy faites. Au nom des Dieux, dit le Roy de Phrigie, ne prenez nulle reſolution dans les premiers mouvemens de voſtre colere : Au nom des Dieux, reprit Ciaxare, ne me parlez plus jamais